Kinnaur & Spiti

 

       

 

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Pendant que Dominique se laissait envoûter par Khajurao et ses 48°C, j'ai opté pour l'altitude et la fraîcheur de 2 vallées reculées de l'Himalaya :

- le Kinnaur, des vallées alpines et des villages au bois mouillé

- le Spiti, montagnes désertes et rugueuses, villages blancs perdus dans cette immensité.

Découverte de coins reculés, avec des moyens de transports aléatoires et pas de café au petit déjeuner ni internet pour donner/recevoir des nouvelles !

 

 

 
   

 

 

 

 

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Le Kinnaur et Chitkull

Mon coup de coeur : Chitkull - 3400m. Un coin à l'écart du monde, plein de charme, blotti dans une vallée verte et riante. Une rivière qui dévale la pente sur des pierres de mousse. Des maisons au bois patiné par l'eau et le temps.

Toute la vie sociale se passe à mi-hauteur sur les toits-terrasses : les gens mangent, se lavent, discutent, travaillent sur leur métier à tisser et apportent même leurs condoléances.

Chitkull est encore à l'écart des touristes. Les habitants sont des kinnauris, à la fois bouddhistes et hindous. Ils sont d'une gentillesse désarmante et portent ce chapeau cylindrique vert, qui me faisait penser à un chapeau de cirque.

 

 

 
       

 

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La route

Après le Kinnaur, frissons sur la Hindustan-Tibet Highway. En guise d'autoroute, c'est un lacet rarement goudronné, une piste se transformant en rivière par endroit et remplie de nids de poule. Très souvent, les glissements de terrain ou les crues du Spiti rendent cette route impraticable.

Ainsi nous sommes restés bloqués 3 heures dans la poussière du bord de la route en attendant qu'un éboulement soit dégagé.

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Un désert minéral

Mais le paysage vaut la peine. Des montagnes sèches, arides, aux allures fantomatiques. De la rocaille brune et ocre. Des gorges de roches abruptes. Et au fond de la vallée, le Spiti, à sec à cette période, dont l'eau dessine des ondulations argentées. On en oublie vite les chaos du bus ou la valise qui meurtrit les fesses. On se laisse juste apaiser par la sensation d'espace et la pureté de la lumière.

 

 

 
   
   

 

 

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Shanti mais...

"La vie est shanti ici". Phrase leitmotiv : la vie est paisible, calme, sans stress. Ennuyeuse? Rude?

Au milieu du désert les parcelles de champs verts semblent irréelles : pommes de terre et blé. Des troupeaux de chèvres et de vaches rentrent chaque soir au village. Le sol est ingrat, les ressources limitées.

L'hiver rigoureux qui bloque les routes oblige les gens à rester enfermés dans leur cuisine, vivant de leur provision et arrosant le temps qui passe lentement avec beaucoup trop d'alcool. L'été le soleil brûle les peaux et la terre.

 

 

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Nako

A Nako (à quelques kilomètres du Tibet!!!), j'ai eu la chance de loger chez une famille, un petit coin de paradis. Seuls les deux parents rarement là parlent anglais, le rejeton est capricieux, les deux grands-mères aux visages parcheminés me fascinent, et le petit aide népalais a un sourire contagieux.

Sur la terrasse, à côté des bouses de vaches qui durcissent au soleil, Mamie Puja fait tourner son moulin à prière toute la journée pendant. Je regarde les drapeaux verticaux qui claquent au vent et les maisons en pisé blanc. Dans les toilettes je jette de la terre en guise de chasse d'eau. Et le soir réchauffée par le tandori (four), c'est un rituel : je regarde la préparation des chapatis (crêpe de pain indienne).

J'aimais ces moments paisibles, sans besoin de mots, avec le moulin qui tourne sans cesse et grince. C'était mon havre de paix.

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La puja (Prière)

9h30 - Ce matin, Mamie Puja me fait signe que elle et moi nous allons à la puja. Elle me fourgue 2 moulins a prière et m'entraîne dans les ruelles de Nako. Avec ces deux accessoires dans les mains, ma casquette et mes lunettes de soleil, je me sens un peu anachronique.

Arrivés au monastère, on mange : une bouillie de légume arrose le tsampa (farine tibétaine) et la soupe Thugpa. Avec le riz et les lentilles du petit déjeuner, je suis calée !

A l'intérieur, deux rangées se font face. Chacun a un livre de prière, une cloche et un tambour. On dirait des élèves de l'ancien temps studieux derrière leur pupitre. Une litanie s'échappe comme un canon mal réglé. Certains piquent du nez.

A l'extérieur, un groupe de femmes fait inlassablement tourner des moulins à prières en psalmodiant ou en papotant avec la voisine.

13h30 - Plus de 2 heures enfermés dans cette pièce glaciale. Est-ce qu'ils vont prier encore longtemps ?

16h15 - Je suis toujours là. J'ai beaucoup mangé : de la bouillie sucrée de vermicelles, du thé au beurre salé, du tchang (texture de porridge goût alcoolisé), des beignets de légumes, des pains. A 16h les dieux aussi ont mangé dans d'immenses pyramides de nourriture, les humains se partagent les restes. Et dans les gamelles s'entassent un mélange hétéroclite : biscuits, bonbons, pommes, pains, beignets de légumes, graines de sésame... On se partage même le coca et le fanta laissés par les dieux. Mon estomac explose !

18h30 - J'arrive enfin à m'échapper. Pour moi la puja est terminée.

Reste que cette journée fut étonnante. J'ai écouté les prières hypnotisantes, le rythme lancinant des tambours, la secousse du vagissement des trompettes, l'arrêt brutal des prières - comme un radiocassette en fin de pile. Je m'échappais de temps en temps à l'extérieur assise face à ce désert minéral et les coulures de couleurs ocres. Puis je retournais dans la salle sombre pleine de mystères.

 

 

 

   

 

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les monastères

Dans cette région de bouddhisme tibétain, les monastères pullulent. Ils ont souvent un emplacement spectaculaire comme Ki, grumeau de maisons blanches sur un pic ou Dankhar, le long d'une falaise abrupte.

C'est dans ces monastères que, pour le petit déjeuner, j'ai fini par apprécier le thé au beurre salé (c'est comme une soupe!). J'ai eu plus de mal pour la tsampa, farine malaxée au thé dont on fait des boulettes. Comme on dit chez moi c'est un peu "agouillant" !

J'aimais beaucoup regarder l'agitation des moines dans leur robes de bure bordeaux.

Les moinillons sont toujours en train de courir la jupe relevée au dessus des genoux comme en retard sur leur planning. Ils se chamaillent. Certains moines avec leurs lunettes de soleil pourraient jouer dans un film de Kung Fu hong-kongais. Le cuisinier relève sa robe : il porte un long short Reebok !

 

 

 

 

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"Joolee!"

L'apostrophe classique dans le Spiti : "Bonjour! comment ça va ? Merci, Je vous en prie, Au-revoir". La voix est chantante et le sourire éclatant !

Voici quelques personnes dont j'aimerais me souvenir :

- le père de famille de Nako me demande des conseils pour sa femme sur les moyens de contraception.

- les enfants de Dankhar, joues écorchées cheveux crasseux me guident dans le dédale des rues et m'ouvrent les portes des petits monastères.

- la propriétaire de la guest house à Kibber avec laquelle j'ai passé l'après-midi m'explique que Tenzin, son fils deviendra lama (moine) comme tous les seconds garçons dans les familles.

- un chauffeur de jeep me raconte que les études de sa fille lui coûtent 12 000 F par an (une fortune en Inde!) "I struggle ma'am, I struggle all the time"

- un autre chauffeur m'emmène chez lui prendre un thé. Choc d'un autre monde et de la pauvreté. Sa petiote hurle dès qu'elle me voit. Même des biscuits n'ont pas réussi à l'apprivoiser.

 

           
   

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en vrac

On quitte l'Inde, à regret. Nos dernières impressions ....

- Shimla station climatique aseptisée et clinquante. Où sont les ordures? Indiens aisés en vacances. Ça manque de saris.

- Ils sont classes les Sikhs avec leurs turbans. Par religion, les hommes ne se coupent ni les cheveux, ni la barbe : ils enroulent leurs excédents pilaires dans leur turban.

- Je dévore un massala dosa (crêpe avec purée de patates épicée), pendant qu'une professeur d'anglais me parle spontanément des crimes de dot. Elle déplore qu'il y en ait autant, mais garde ce ton de froide indifférence. L'Inde est un mystère.

Lisez cet article sur les crimes de Dot en Inde !!

- Une grosse masse passe à côté de nous : un éléphant se promène dans une rue de Delhi.

- Promenade en rickshaw dans Delhi : sueur froide, fumée et loupiotes des vendeurs de rues, lumière brune et foule écrasante dans la chaleur poisseuse.

 


 

 

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Le retour en Inde

 

Sur le chemin du retour, j'ai eu un choc au col de Rohtang (3978m). Dans un décor de montagnes, des embouteillages de voitures, des centaines d'indiens costumés du même manteau de fourrure loué pour la journée, des poneys pour l'animation et des skis à louer. Je vois même un indien poser ses pieds sur les skis (sans les chausser) et prendre la pause pour la photo. Ce n'est pas une station de ski et la neige est crasseuse. Mais pour ces Indiens vacanciers, c'est la première fois qu'ils peuvent la toucher.

 

Je suis bien de retour en Inde avec son burlesque et cette foule qui désarme par son grain de folie. Bientôt je vais retrouver les palak paneer (épinard et fromage), les chicken tikka et peut être même les cafards dans les salles de bains...

 

 

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